Qui peut bénéficier une expertise : CSE central ou d'établissement

Qui peut bénéficier une expertise : CSE central ou d'établissement

Dans les entreprises à établissements multiples, la répartition des compétences entre le comité social et économique central (CSEC) et les CSE d'établissement (CSEE) en matière de recours à l'expertise, prévue aux articles L. 2315-92 et L. 2315-94 du code du travail, peut soulever des questions.

Qui a le droit de se faire assister par un expert-comptable ou un expert habilité dans le cadre des consultations récurrentes sur les orientations stratégiques, la situation économique et financière ou la politique sociale de l'entreprise (C. trav., art. L. 2312-17) ?

Le CSE central est-il seul compétent ou les CSE d'établissement ont-ils aussi leur mot à dire, dans la limite des pouvoirs confiés aux chefs d'établissement (C. trav., art. L. 2316-20) ? La désignation de l'expert par le CSE central empêche-t-elle les CSE d'établissement d'en désigner un à leur niveau ?

Un accord collectif peut-il modifier les règles légales de répartition des consultations (C. trav., art. L. 2312-19) ?

Éclairage sur ces règles issues du code du travail et de la jurisprudence, qui ont des impacts importants sur le dialogue social et les attributions des représentants du personnel.

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Le CSE central a des prérogatives plus larges en matière d'expertise

Le CSE central a des prérogatives plus larges en matière d'expertise, conformément aux dispositions du Code du travail (art. L. 2316-1 à L. 2316-3). Le comité social et économique central est seul consulté et peut avoir recours à un expert-comptable ou un expert habilité (art. L. 2315-78) sur les projets décidés au niveau de l'entreprise qui ne comportent pas de mesures d'adaptation spécifiques aux établissements distincts, ou lorsque les mesures de mise en œuvre communes à plusieurs établissements ne sont pas encore définies. 

Ainsi, si la désignation d'un expert est envisagée dans le cadre d'une consultation du CSE central sur un projet important modifiant les conditions de travail (art. L. 2312-8), elle est effectuée par le CSEC. Lui seul pourra se faire assister par un expert agréé dans ces situations, dans le cadre de ses attributions économiques et en matière de santé, sécurité et conditions de travail (art. L. 2315-94). Cette expertise est financée à 80% par l'employeur et 20% sur le budget de fonctionnement du CSE (art. L. 2315-80)

Pour en savoir plus : Prise en charge financement expertise CSE : tableau récapitulatif

Livre blanc : Comment l'expert-comptable AXIUM accompagne les élus du CSE sur l'économie et le social ?

 

Des possibilités plus limitées pour les CSE d'établissement

Le CSE d'établissement peut faire appel à un expert uniquement lorsqu'il démontre l'existence de mesures d'adaptation du projet spécifiques à l'établissement, relevant de la compétence du chef d'établissement, et ayant des incidences précises et concrètes sur les conditions de santé, sécurité ou de travail.

Selon l'article L. 2316-20 du Code du travail, le comité social et économique d'établissement a les mêmes attributions que le comité social et économique dans la limite des pouvoirs confiés au chef de cet établissement. 

Cependant, il ne dispose pas d'un droit général à l'expertise prévu à l'article L. 2315-94 du Code du travail et doit prouver que les conditions légales sont réunies. À défaut, la désignation d'un expert par le CSEE n'est pas valable.

Cette expertise est financée à 80% par l'employeur et 20% par le CSE sur son budget de fonctionnement alloué aux activités sociales et culturelles, sauf accord plus favorable. Le recours à l'expert doit faire l'objet d'une délibération votée à la majorité des membres titulaires élus de la délégation du personnel du comité.

 

Pas de double expertise sauf en cas de double consultation

Il ne peut y avoir de double expertise, au niveau central et au niveau de l'établissement, qu'en cas de double consultation devant le CSE central et le CSE d'établissement.

C'est le cas lorsqu'un projet d'aménagement important modifiant les conditions de santé, de sécurité ou les conditions de travail (C. trav., art. L. 2312-8) est décidé au niveau de l'entreprise mais nécessite des mesures d'adaptation relevant de la compétence du chef d'établissement.

Le CSE central et le CSE d'établissement concerné peuvent alors désigner un expert habilité (C. trav., art. L. 2315-94), dont le coût est pris en charge par l'employeur, dans le cadre de leurs attributions consultatives respectives définies par accord collectif ou à défaut par le Code du travail (C. trav., art. L. 2312-19 et L. 2316-20).

Cette possibilité de double niveau d'expertise en cas de projet important découle des règles relatives à l'articulation des consultations récurrentes et ponctuelles entre les différents comités sociaux et économiques de l'entreprise.

L'expertise "risque grave" reste possible pour les CSEE

En cas de risque grave, identifié et actuel, révélé ou non par un accident du travail ou une maladie professionnelle, constaté dans l'établissement, le CSE d'établissement semble aussi pouvoir recourir à une expertise, indépendamment d'une expertise décidée par le CSE central (C. trav., art. L. 2315-94).

Une expertise pour projet important modifiant les conditions de santé, de sécurité ou les conditions de travail décidée par un CSE central n'empêche donc pas une expertise pour risque grave décidée au niveau local par un CSE d'établissement.

Cette expertise risque grave est financée à 100% par l'employeur . Le recours à l'expert doit faire l'objet d'une délibération votée à la majorité des membres titulaires élus de la délégation du personnel du comité

Si le CSE central dispose de larges prérogatives pour recourir à l'expertise, notamment dans le cadre des consultations récurrentes sur les orientations stratégiques, la situation économique et financière et la politique sociale de l'entreprise (C. trav. art. L. 2315-87 à L. 2315-91), les possibilités sont plus encadrées pour les CSE d'établissement.

Ces derniers doivent en effet démontrer leur compétence, l'existence de mesures d'adaptation spécifiques relevant du chef d'établissement et l'existence d'incidences précises et concrètes du projet sur la santé, la sécurité ou les conditions de travail des salariés de l'établissement. (Cass. soc. 16 févr. n 20-17. 622. Cass. soc. 14 déc. n 21-22. 426.) Un accord d'entreprise, conclu avec les organisations syndicales représentatives dans les conditions de l'article L. 2232-12 du Code du travail, peut utilement préciser l'articulation des consultations et expertises entre le CSE central et les CSE d'établissement.

Un accord d'entreprise, conclu avec les organisations syndicales représentatives dans les conditions de l'article L. 2232-12 du Code du travail, peut utilement préciser l'articulation des consultations et expertises entre le CSE central et les CSE d'établissement.

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